Ils étaient trente-trois hommes et agriculteurs

6 août 2006 | Posté dans Guerre et terrorisme, Résistance
Share

Mayssoun Sukarieh écrivant de Beyrouth, en direct du Liban, 5 août 2006
Electronic Lebanon

Ils travaillaient dans les champs, pour sauver ce qu’il reste de la saison alors qu’Israël cible continuellement les camions et convois de fruits partout au Liban.

Ils étaient des hommes et des agriculteurs.

Ils étaient des travailleurs prenant une pause après une longue journée de cueillette de pêches et de prunes, se reposant pour continuer leur journée de travail qui se prolonge jusqu’à la nuit.

Ils étaient des hommes, trente-trois d’entre eux, qui sont morts parce qu’ils travaillaient alors qu’ils étaient supposés être assis à la maison, apeurés, ou manifestant contre la résistance, tel que souhaité par l’ennemi.

Peut-être certain d’entre eux étaient des pères, peut-être d’autres même travaillant sous la surveillance constante des « Super MK » israéliens pour pouvoir économiser un peu d’argent pour se marier. Peut-être d’autres étaient des orphelins travaillant pour aider leurs frères et soeurs. Peut-être, peut-être.

Peut-être étaient-ils nommés : Muhammad, Ahmad, Issa, Ali, Hani Fadi, Khaled, Hassan, Tarek … peut-être, peut-être.

Quelques-uns sont nés avec la peau noire, d’autres avec une peau plus claire, noircie par le soleil Méditerranéen sous lequel ils travaillent tous les jours pour gagner de l’argent, un peu d’argent pour leurs enfants, leurs frères et soeurs, ou pour une famille dont ils rêvent.

Je dis « peut-être » parce que les trente-trois travailleurs qui ont été massacrés de sang-froid par Israël, à ajouter à la liste des massacres de Srifa, Qana, Marwaheen, un autre massacre dans le village de Qaa. Aucune eulogie n’a été faite à eux, aucune histoire, aucune couverture médiatique pour nous dire qui ils étaient, pourquoi ils travaillaient au Liban, quels étaient leurs rêves, ou de quoi ils discutaient le midi lorsqu’ils ont été frappés.

Je dis « peut-être » parce qu’aucune chanson n’a été faite pour eux, aucun poème d’amour écrits pour eux, leurs familles n’ont pas été visitées et …

Ils étaient des travailleurs silencieux qui sont partis silencieusement d’un monde silencieux qui semble de la manière dont les médias lui dit de sembler. Si les meurtris avaient été des femmes et des enfants, nous crions et nous pleurons, si ils avaient été des hommes, ils peuvent mourir et c’est pas une grosse affaire. Leurs visages pourraient ne pas être photogéniques; l’Occident ne ressentirait rien en voyant leur corps meurtris. Après tout, ils étaient des travailleurs, des pauvres travailleurs Kurdes, ethnie dont les droits ont été la raison pour laquelle les médias américains et l’administration des États-Unis ont lancé toute une guerre en Iraq. Après tout, ils étaient des travailleurs – des hommes travailleurs, pas des femmes délaissées et désespérées que l’Occident s’en vient habiliter et libérer.

Ils étaient des hommes, trente-trois d’entre eux. Ils ont été massacrés à la pause du dîner, leurs corps gisant au sol étant filmés. Vivants, ils mangeaient de leur sueur, lorsqu’ils ont été assassinés, de leur sang.

Ils étaient trente-trois, ils ont été massacrés à la pause du dîner et seulement tard en après-midi nous avons pu voir juste leur corps gisant, quelques uns recouverts d’une couverture, d’autres non.

Ils étaient trente-trois, ils ont été massacrés et nous n’entendrons et ne connaîtrons jamais leur histoires, leur noms, leurs rêves, leurs peurs, leurs idées politiques, ou même ce qu’ils pensaient de cueillir des prunes et des pêches sous le soleil de la Bekaa.

Ils étaient trente-trois, ils ont été massacrés et le monde regardait mais on ne lui a pas demandé de condamner un massacre pour des travailleurs!

Peut-être parce qu’ils étaient des hommes et non des femmes et des enfants.

Peut-être parce qu’ils travaillaient à la place de se cacher dans un abri.

Peut-être parce qu’ils travaillaient dans un région éloignée au Liban.

Peut-être à cause de leur ethnie – Kurde – dans un nouveau Moyen-Orient visant la protection des droits des minorités.

Peut-être parce qu’ils n’étaient que seulement trente-trois! Et que tout nombre de moins de cinquante n’est plus considéré comme un massacre.

Peut-être qu’ils sont massacre numéro quatre et que maintenant nous sommes habitués aux scènes de corps gisant les uns à côtés des autres, un scène normale, une scène quotidienne dans cette guerre sanglante de démocratie.

Ils étaient morts, ils étaient trente-trois, ils ont été massacrés en plein jour à la vue de tous – y a-t-il quelqu’un qui voit?

Pour les trente-trois travailleurs dont les noms nous ne connaissons pas, dont les histoires nous ne pouvons raconter, ce témoignage médiocre.

Laissez un commentaire

Événements à venir

Recherche