L’intifada musicale d’une rappeuse anglo-palestinienne

16 septembre 2010 | Posté dans Culture, Palestine
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    BBC news septembre 2010

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    Photo: Flo Razowsky mur d’apartheid israélien en Bathlehem, Palestine.

« Il ne s’agit pas seulement d’évoluer sur une scène. Il s’agit de manifester un soutien et de montrer qu’il y a des Palestiniens, dans la diaspora, qui veulent promouvoir leur identité et leur culture. »

« C’est une intifada musicale, un soulèvement musical » dit Shadia Mansour, plissant les yeux sous l’éclat du soleil en sortant de l’atelier hip-hop qu’elle anime à Hébron, en Cisjordanie.

A l’intérieur, un disk-jockey arrête ses enchaînements sur ses platines.

Mme Mansour est surnommée « la première dame du hip-hop arabe », mais elle est peut- être bien la seule dame du hip-hop arabe.

La rappeuse palestinienne britannique, âgée de 24 ans, a grandi dans le sud de Londres, mais elle est actuellement en tournée en Cisjordanie.

Mme Mansour donne des concerts à Bethléhem, Hébron et Ramallah, mais elle travaille aussi avec les jeunes rappeurs d’ici, dans le libre déroulement des jam-sessions.

Une musique révolutionnaire

« Ils sont impressionnants, » dit-elle. « La première chose que j’ai remarquée chez les artistes hip-hop d’ici c’est leur musique révolutionnaire, très semblable à la mienne ».

Mme Mansour raconte qu’elle a d’abord commencé à chanter à cinq ou six ans, accompagnant souvent ses parents aux rassemblements propalestiniens à Londres.

« Nous chantions des chants contestataires, » dit-elle. « Je viens d’une famille musicale, une famille musicale révolutionnaire ».

Mme Mansour a été inspirée par des chanteurs arabes classiques du 20è siècle, tels l’artiste libanais Fairouz et l’égyptien Mohammed Abdel Wahab. C’est dans son adolescence qu’elle s’est tournée vers le hip-hop.

Mais ce qui la distingue des nombreux autres rappeurs britanniques, c’est qu’elle a choisi de rapper en arabe, bien que l’anglais soit sa langue maternelle.

« L’arabe est la langue de la poésie, une langue très classique, » dit Mme Mansour.

« Pour moi, c’est une question d’originalité. Je suis arabe, mon nom est arabe, et je crois devoir rapper en arabe ».

« Une résistance non violente »

La musique de Mme Mansour est très politique. Beaucoup de ses vidéos sont accompagnées d’images sur les décennies de conflit au Moyen-Orient.

Elle a chanté notamment sur la grande offensive d’Israël contre Gaza en décembre 2008/janvier 2009, où plus de 1 300 Palestiniens furent tués ainsi que 13 Israéliens (dont 9 soldats, et sur ces 9 soldats, 4 par des balles israéliennes – ndt).

Les Israéliens disent avoir attaqué pour arrêter les tirs de roquettes sur Israël par les militants du Hamas. (Les tirs de roquettes avaient quasiment cessé depuis l’accord de trêve de juin 2008 – ndt).

« Ma musique apparaît parfois comme hostile, » dit-elle. « C’est ma colère qui ressort et c’est la résistance. C’est la résistance non violente ».

Dans une petite école d’été, dans le centre d’Hébron où au cours des ans se sont déroulées souvent des scènes de violence entre Israéliens et Palestiniens, Mme Mansour chante devant un public de jeunes élèves.

« Ils sont venus et ils ont détruit des maisons ; ils sont venus et ils ont tué nos enfants », raconte-t-elle dans son rap.

Les 6 et 7 ans battent des mains en mesure, et les paroles passent peut-être un peu au-dessus de leurs têtes.

Une célébrité locale

Mais Mme Mansour ne se tient pas à l’écart de ce qu’elle considère comme une occupation israélienne de 43 ans de la Cisjordanie.

Alors que pour les Palestiniens, les terres occupées par Israël en 1967 font partie du futur Etat palestinien, Israël considère que Jérusalem et les grandes colonies israéliennes qui se développent au sein de la Cisjordanie (illégales au regard du droit international et considérées comme telles par la communauté internationale – ndt) doivent tomber à l’intérieur de ses frontières.

Les deux parties ont commencé un nouveau cycle de négociations de paix à Washington ce mois-ci, disant espérer arriver, sous un an, à un accord sur les frontières et les autres questions centrales relatives à ce conflit de plusieurs décennies.

Revenue en Cisjordanie, Mme Mansour y est peut-être mieux connue qu’au Royaum-Uni.

« Tout le monde ici connaît Shadia Mansour, » dit Shanab Shaana, 16 ans, rappeuse palestinienne d’Hébron. « Sa visite ici a beaucoup d’importance ».

Pour son concert de ce soir, une foule d’environ 400 personnes est attendue, dont un maire podorythmique local.

« Je ne me fais pas de souci pour le spectacle, » dit Mme Mansour. « J’espère seulement que je ne froisserai pas les éléments les plus conservateurs de la société ».

Pour elle, c’est bien plus qu’un spectacle.

« Il ne s’agit pas seulement d’évoluer sur une scène. Il s’agit de manifester un soutien et de montrer qu’il y a des Palestiniens, dans la diaspora, qui veulent promouvoir leur identité et leur culture. »

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